La décarbonation des transports est essentielle pour rendre la mobilité plus durable et permettre à la France d’atteindre ses objectifs climatiques. Le cap est clair : la neutralité carbone en 2050 !
EuMo Expo 2024 sera l’occasion de faire le point sur les enjeux de la transition énergétique dans le secteur des transports, d’échanger avec des experts européens et de découvrir des retours d’expérience dans d’autres pays d’Europe.
Lors de votre visite, aventurez-vous dans les allées pour découvrir les solutions concrètes proposées par nos exposants pour décarboner le secteur : biocarburants, infrastructures de recharge, production et recyclage des batteries… Petit aperçu dans notre article. 👇
Les biocarburants
La stratégie nationale bas carbone (SNBC) s’est donnée pour objectif de réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) de 28% dans le secteur des transports à horizon 2030 par rapport à 2019. Principal levier de décarbonation des véhicules lourds identifié, le verdissement des carburants et des motorisations. Les carburants liquides bas carbone (CLBC) fournissent une solution immédiate et compétitive pour les véhicules diesel en circulation comparée aux autres énergies, notamment parce que les CLBC ne nécessitent pas d’investir dans de nouveaux bus et autocars.
En 2020, le groupe Avril se lance sur le marché du B100 avec la marque Oleo100 : un biocarburant produit à partir du colza destiné aux moteurs diesel des flottes captives. Un succès : l’entreprise ouvre 500 cuves par an, soit deux par jour en France, chez ses clients (Transdev, Keolis, Flixbus notamment). Parallèlement, l’entreprise a travaillé avec Iveco pour proposer un car scolaire homologué B100 à la rentrée 2024… Parmi les atouts du B100, son prix sensiblement équivalent à celui du litre de gazole en raison d’une fiscalité avantageuse. « Sur l’analyse du cycle de vie [du champs à la roue], le B100 permet de réduire jusqu’à 60% les émissions de GES par rapport au diesel conventionnel » selon les données de la base Carbone de l’ADEME, souligne Florian MOHAND, directeur de la transition énergétique chez Bolloré Energy qui gère la logistique et la distribution de produits énergétiques.
Autre atout, le B100 exclusif, c’est-à-dire les poids lourds qui roulent exclusivement avec du B100, bénéficie d’un suramortissement et de la vignette Crit’Air 1 qui assure aux véhicules de pouvoir circuler dans les zones à faibles émissions (ZFE). Seul bémol, la production nationale actuelle de B100 permet de servir environ 60 000 véhicules lourds, soit 10% environ du parc, selon Claire DUHAMEL, directrice générale d’Oleo100. Car la production de B100 dépend directement de la surface agricole consacrée à la culture du Colza destinée d’abord à l’alimentation animale et à la production d’huile alimentaire…
Autre biocarburant qui monte, le HVO, produit à 100% à partir d’huiles usagées. Ce carburant présente l’avantage d’être totalement miscible avec le diesel, et permet donc aux transporteurs de se ravitailler en itinérance. La profession attend ainsi la parution de l’arrêté qui permettra de vendre du HVO100 en station… Reste que la production française et européenne ne permet pas, à ce stade, de répondre à la demande. En outre, sa production nécessite un hydrotraitement qui rend son prix de revient non-compétitif – autour de
3 € le litre, soit environ 15 centimes plus chers que le diesel en intégrant le système de la TIRUERT : les mandats nationaux d’incorporation d’énergies renouvelables issus des directives européennes RED et FQD augmentent progressivement, mais à un rythme insuffisant qui empêche la filière de se développer, selon Florian MOHAND. Bolloré Energy sert notamment en HVO100 les bus en Franche-Comté et une expérimentation est en cours sur la ligne SNCF Besançon-La Chaux de Fonds (Suisse). La filière demande, en outre, un alignement de sa fiscalité sur celle du B100, et espère que les discussions en cours avec l’Etat permettront de le rendre éligible à la vignette Crit’Air 1. Ces promoteurs font valoir que l’HVO100 permet de réduire jusqu’à 90% les émissions de GES par rapport à un véhicule diesel sur l’analyse du cycle de vie (ACV).
Le règlement européen CO2 calcule les émissions du réservoir à la roue, ce qui désavantage les biocarburants. Les professionnels comptent donc sur la clause de revoyure prévue en 2027 pour qu’ils soient considérés comme des « carburants propres ». « En raison d’une réglementation mouvante, nous manquons de visibilité pour nos investissements de plus long terme », regrette Claire DUHAMEL d’Oleo100…
Les infrastructures de recharge pour véhicules électriques
Le verdissement des motorisations passe notamment par la conversion des flottes à l’électrique – 37% des nouvelles immatriculations de bus en 2022. Cependant, le coût de possession d’un véhicule électrique (TCO) restera très supérieur à celui d’un véhicule diesel au moins jusqu’en 2030, selon la feuille de route de décarbonation des véhicules lourds qui préconise des aides directes plutôt que des prêts à taux zéro pour faire face à ce mur d’investissement.
Concernant les bornes de recharge, l’exécutif a annoncé, en octobre 2023, 200 M€ supplémentaires au travers du programme Advenir pour accélérer leur déploiement et doit annoncer un schéma national des sites de raccordement haute puissance des stations de recharge incluant notamment les aires des grands axes routiers pour faciliter la mobilité en itinérance.
Aujourd’hui, les systèmes de charge pour véhicules lourds se font essentiellement dans les dépôts de bus en milieu urbain. L’Espagnol Jema Energy (groupe Irizar) a déjà installé 10 000 points de charge dans des dépôts en Europe pour diverses marques de bus, y compris à Paris pour les bus opérés par la RATP. Avec sa nouvelle solution automatisée de rechargement Gamma, elle évite l’utilisation de main-d’œuvre pour manipuler les câbles, permettant aux bus de se recharger de face ou en parallèle par rapport au pantographe. Jema Energy propose des solutions clé en main et sur mesure afin de s’adapter aux contraintes de chaque dépôt : de la gestion de projet pour optimiser l’installation, en passant par des sous-traitants pour les travaux de génie civil et d’installation électrique, tout en assurant la maintenance et le SAV. « Nos clients sont préoccupés en premier lieu par une adaptation à leur mode opératoire et aux contraintes physiques du dépôt, puis par la pérennité du service et notre capacité à suivre les évolutions des standards dans le temps, » souligne Estibalitz ARAMBURU, directrice commerciale et marketing chez Jema Energy. C’est pourquoi Jema Energy est membre de groupements européens comme CharIN et consacre 10% de son chiffre d’affaires à la R&D pour maintenir sa capacité d’innovation et répondre aux attentes de ses clients.
Opérateur de recharge pour les camions, Chargepoly se lance dans le transport public de voyageurs. L’entreprise a consacré trois ans de R&D à la mise au point de stations de recharge et leur logiciel d’optimisation de la gestion énergétique des flottes. Une diversification qui nécessite d’expliquer à ce nouveau marché la particularité de son innovation : une architecture distribuée constituée d’une armoire de puissance (power unit) et de satellites de recharge. Entre les deux, un microgrid en courant continu qui nécessite peu de génie civil et un algorithme de pilotage « intelligent » qui va permettre de distribuer la bonne puissance au bon moment au bon véhicule. « Une puissance mutualisée permet d’optimiser les coûts et notre architecture réduit fortement l’empreinte au sol des bornes, souligne Thomas VANQUAETHEM, directeur général adjoint de Chargepoly. Nous expliquons notre technologie notamment aux bureaux d’étude afin qu’ils rédigent un cahier des charges plus agnostique en termes de technos. » Chargepoly propose, en outre, un accompagnement pour le design et le dimensionnement de l’infrastructure ainsi que des solutions de financement (leasing ou tiers-investissement). Pour compléter son offre, la start-up travaille avec la société DREEV, co-entreprise entre EDF et la start-up californienne NUVVE, afin d’acheter de l’électricité au meilleur prix et de proposer demain du V2G (Vehicule-to-Grid) : « Notre plateforme est interconnectée avec celle de DREEV qui a une vision horaire du marché de l’électricité Spot. Ce partenariat permet à nos clients de faire jusqu’à 40% d’économies sur leurs dépenses énergétiques », souligne Thomas VANQUAETHEM. Chargepoly s’appuie aussi sur son actionnaire majoritaire Voltalia (producteur d’énergies renouvelables dans une vingtaine de pays) afin que la production photovoltaïque puisse à terme alimenter des stations de recharge…
La production et le recyclage des batteries
L’électrification des transports devrait multiplier la demande de batteries par 14 d’ici à 2030. Pour y répondre, la France a soutenu, en 2017, l’Alliance européenne des batteries, initiative de la Commission pour créer une filière franco-allemande des batteries intégrant à terme l’ensemble de la chaîne de valeur.
Spécialisé dans les toits ouvrants, les chauffages additionnels et climatisations pour les véhicules, Webasto, une société allemande, s’est lancée, dès 2019, dans la fabrication de batteries NMC (nickel-manganèse-cobalt) destinées aux véhicules électriques commerciaux. L’équipementier sort un nouveau modèle à 40 kWh (contre 35 kWh auparavant), soit plus de densité énergétique et donc d’autonomie pour un même poids et taille. « Nous développons des solutions de batteries personnalisées ou sur mesure pour les véhicules de tourisme et utilitaires selon les spécifications de nos clients. Et nous proposons des batteries standardisées comme la Pro 40 qui conviennent également aux modèles avec des volumes inférieurs, comme les navettes Cristal du Français Lohr, explique Frédérique SCHMIDT-BARICAULT, Key Account Manager chez Webasto. Le BMS (Batttery Management System) fait partie de nos savoir-faire différenciants pour optimiser leur durée de vie, notamment leur gestion thermique comme nous le faisons pour les Bluebus, par exemple ».
Dans cette chaîne de valeur, l’Allemand Schaltbau fabrique des contacteurs DC qui s’intègrent dans les BMS sous la toute nouvelle marque Eddicy : ils servent à la mise sous tension ou hors tension de la batterie et participent à la sécurité de leur pilotage. Schaltbau fournit notamment des fabricants de batteries comme Forsee ou des constructeurs comme Safra (bus à hydrogène). L’équipementier ambitionne de devenir d’ici à 2026 le leader des contacteurs DC pour la mobilité et l’énergie – stockage stationnaire de l’électricité, ou encore les bornes de recharge – en France, Schaltbau travaille déjà avec DBT.
La France a lancé, en 2018, un premier plan batteries – remplacé en 2021 par la stratégie nationale batteries de France 2030 – afin d’accélérer l’émergence d’une filière de production de batteries en France qui inclut leur recyclage comme l’exige l’UE depuis la Directive batterie de 2006. Bib s’est spécialisé dans la gestion des batteries des flottes de véhicules électriques (ALD, Arval, Agilauto, Hertz et des constructeurs automobiles. « Notre plateforme permet d’analyser l’état de santé de toute une flotte, en direct et à distance, sans intervention humaine », explique Pierre-Amans LAPEYRE, co-fondateur et CEO de Bib. Pour celles qui ne sont plus opérationnelles, la start-up fait une offre de rachat à son client puis trouve les partenaires pour les recycler ou leur donner une seconde vie en fonction de ce qui est le plus économique et le plus écologique. Bib se charge enfin de la logistique et livre les batteries à ses partenaires. « Notre mission est de passer du coût du recyclage de la batterie à une valeur positive de la batterie, explique Pierre-Amans LAPEYRE. Un seul acteur ne relèvera pas le défi tout seul : nous avons besoin de l’implication en amont des gestionnaires des flottes, des constructeurs, conducteurs, et en aval, de projets industriels de recyclage et de seconde vie. Nous devons raisonner en termes de filière. ».